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Esprit (de défense) es-tu là ?

Contre la militarisation des esprits
Jeudi 28 novembre 2024

Lutte de Classes éducation relaie un texte contre le SNU publié dans le média drômois Ricochets.

SNU - affiche LDC éduc Gre (27.11.24)

C’est comme un guignol spectacle permanent Et vive l’école et vive le régiment Les gentils, les méchants – Michel Fugain

Depuis le temps que le SNU est en expérimentation, on ne compte plus le nombre de malaises pour cause de garde à vous prolongé sous le cagnard. Le Retex (retour d’expérience en jargon militaire) s’alourdit si on dénombre aussi les cas de harcèlement sexuel ou de brimades racistes. Jusque là, nos caboches chevelues et nos esprits vaguement antimilitaristes clamaient : « C’est pas étonnant, quand on confie des jeunes aux bidasses ! ». Mais attention, on se fait taper sur les doigts pour moins que ça. Voyez plutôt la plainte de Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, contre Olivier Cuzon, un syndicaliste brestois qui, en relayant des cas avérés de racisme et d’homophobie dans la police et l’armée, soulevait qu’il y avait en France des professionnel.les habitué.es au contact avec les jeunes, et d’autres qui n’en étaient pas. Résultat : une plainte pour injure et diffamation [1]. C’est qu’on ne rigole pas avec les galons.

La farce du SNU n’est visiblement pas du goût de toutes ses premières cibles, puisque la Cour des comptes y constate un taux de désistement de 28 %. Certes, cela fait déjà quelques participant.es en moins dans ces colos d’embrigadement, mais faut-il pour autant leur souhaiter de vivre des violences pour que les jeunes soient dégoûté.es de l’armée ? Autant ne pas y aller ! Il y a des tracts instructifs [2] qui expliquent que pour l’instant rien n’est obligatoire, qui détaillent les coûts faramineux de l’opération ou bien le flou juridique autour de l’encadrement des jeunes. Mais voilà, il y a les profs cocardiers, le chantage à ParcourSup, le fameux stage de 2de obligatoire auquel on peut échapper si on fait le SNU, il y a les Youtubeurs et autres influenceurs qui font du SNU une aventure [3], il y a l’effet de mode qui pourrait s’emparer de la classe. Et puis, il y a le Ministère de l’Éducation nationale qui claironne, au lendemain d’un rapport pourtant accablant de la Cour des Comptes, un taux de satisfaction de 98 %.

Parents, profs, ami.es, qui êtes proches de personnes qui font leur SNU, vous voilà dans une impasse ! Que souhaiter à votre proche ? En effet, que dire des séjours qui se « passent bien » ? « Tu sais, il n’y avait pas trop de militaires. Oui, la levée des couleurs et la marseillaise, mais le reste, c’était surtout apprendre à se connaître et faire du sport ! »

Oui, un « séjour de cohésion » réussi, ce sont des jeunes qui ont fait plein d’activités chouettes ensemble, qui ont appris à « cultiver les différences » quitte à parfois chanter des gospels à la gloire de Jésus (oups), mais mis à part ce genre de dérapages, ce qui en ressort, c’est « une certaine forme d’engagement » avec, en filigrane kaki plus ou moins prononcé, l’esprit de cohésion, la force morale, le lien armée-nation, le potentiel sacrificiel et la mobilisation nationale. Tous ces termes ont un moteur qui porte un nom : l’Esprit de Défense.

Parents, profs, cousin.es, le SNU est d’autant plus à combattre qu’il a réussi, par-delà les scandales, non seulement à ré-initier le débat sur le service militaire pour les plus réacs (« la jeunesse ne respecte rien ») mais aussi à faire tenir des positions ambiguës aux sphères associatives pourtant les plus progressistes (comme le Planning familial qui fait des formations à l’intérieur des centres SNU).

Mais le combat ne doit pas s’arrêter à sa partie la plus visible. En effet, l’iceberg de la militarisation dont le SNU est la partie émergée cache une intrication, aussi tentaculaire qu’elle est ancienne, de l’armée dans l’Éducation nationale. À n’en point douter, l’antimilitarisme radical a fait un petit somme ces dernières années, mais en exhumant quelques tracts des années 80, les plus jeunes pourraient découvrir par exemple le protocole Hernu-Savary, des noms des ministres respectivement de la Défense et de l’Éducation, qui visait, en 1982, à « favoriser les relations régulières entre militaires et enseignants » [4].

De nos jours, on reproche à la ministre de l’Éducation actuelle de traîner des casseroles d’esclavagiste, mais il faudrait aussi lui mettre le nez dans ses activités à la commission de la Défense nationale et des forces armées ou bien à l’OTAN, où elle siégeait il y a peu. Un pedigree qu’elle ne manquera pas d’utiliser dans ses nouvelles fonctions. Le terrain est d’ailleurs bien miné. Un exemple [5] : connaissez-vous les Classes Défense, ce dispositif qui consiste à faire parrainer une classe de collège par une caserne de son choix dans le but de faire des sorties ensemble et de découvrir le métier ? Bien souvent, les « sorties » sont des séances de recueillement collectif devant des monuments lors de cérémonies officielles. Le fameux « devoir de mémoire ». Le dossier « Classes Défense en action » du Général Menaouine, directeur du service national et de la jeunesse au sein du ministère des Armées, montre avec brio le résultat d’un an de propagande sur les jeunes dans plus de 570 Classes Défense [6].

Plus subtil, et dans la continuité du protocole Hernu-Savary, il existe ce qu’on appelle le Trinôme académique ; une collaboration étroite entre votre recteur.ice d’académie, un militaire et le mystérieux institut au doux nom d’IHEDN (Institut des hautes études de Défense nationale ). Le rôle des milliers de « bénévoles » de cette « simple association » est clairement défini en 4 axes dans la convention-cadre [7] qui la lie au ministère des Armées et à celui de l’Éducation nationale :

  • 1er axe : Développer l’esprit et la culture de défense dans les programmes scolaires.
  • 2e axe : Intensifier les liens entre les communautés militaire et enseignante.
  • 3e axe : Favoriser le partenariat entre les deux institutions notamment par des échanges d’information, de formation et de réflexion.
  • 4e axe : Développer des actions sensibilisant les jeunes générations à l’esprit de défense.

Vous voulez en savoir plus ? Vous ne comprenez pas la différence entre ces 4 axes ? Vous pourrez vous rapprocher de votre antenne locale, il existe 32 associations régionales [8], ou lire leur prose sur leurs sites respectifs. N’ayez crainte, ce sont des gens sympas, et ils se mettent régulièrement en scène pour de charmants évènements dont voici quelques exemples :

  • Le 5 novembre 2024 à Lyon : Conférence – Guerre de haute intensité et force morale : Castelnau et la bataille de la trouée de Charmes
  • Le 15 novembre 2024 - Gala des officiers de l’Association des Officiers de Réserve de Lyon à Collonges au Mont d’or Abbaye Paul Bocuse Quai de la Jonchère

Si vous avez raté ces dates, vous pouvez toujours vous renseigner sur les suivantes ou bien demander des comptes aux multiples courroies de transmission du « trinôme » de votre académie. Pour l’académie de Grenoble, une recherche succincte donne quelques noms comme par exemple , en guise de « relais éducation-défense en bassin de formation » :

Ardèche :

  • Ardèche méridionale : M. Michael VIDAUD principal du collège Le Laoul à Bourg-Saint-Andéol
  • Ardèche verte : M. Philippe TAMISIER, proviseur du lycée Gabriel Faure à Tournon-sur-Rhône
  • Drôme-Ardèche centre : Mme Christelle CAPEVAND, principale du collège Ch. de Gaulle à Guilherand-Granges

Drôme :

  • Drôme des collines : M. Pascal BROQUET, proviseur du lycée polyvalent Henri Laurens à Saint-Vallier
  • Sud-Drôme : M. Toufik BENADDA, proviseur adjoint du lycée Roumanille à Nyons
  • Vallée de la Drôme : M. Thierry DELAVET, principal du collège Revesz-Long à Crest

En bref, il ne manque pas d’occasions et de bureaucrates à qui rappeler que nous refusons l’embrigadement et les guerres. L’infecte soupe militariste dans laquelle nous, jeunes comme moins jeunes, baignons chaque jour un peu plus, nous débecte. Renversons la casserole !

Le SNU qu’est ce que c’est  

Le SNU s’adresse à tous les volontaires français de 15 à 17 ans et comporte trois phases.

  • Un « séjour de cohésion » de 12 jours. Une colo de propagande pendant laquelle le ministère des Armées propose par exemple une journée « clés en main » dénommée JDM : Journée défense et mémoire [9]. La gendarmerie ou la police ne sont pas en reste puisque le ministère de l’Intérieur y propose aussi sa propre journée « clés en main », la JSI : Journée sécurité Intérieure [10].
  • Une « mission d’intérêt général » de 84 heures réparties au cours de l’année. Au choix, travail gratuit ou embrigadement puisque, la gendarmerie et le ministère de l’Intérieur, via leurs plans intitulés respectivement #répondreprésent et « 10 000 jeunes », tentent de faire le plein de « cadets » à cette occasion.
  • Une « période d’engagement » facultative au cours de laquelle le/la jeune pourrait découvrir un métier des « corps en uniforme ».

Un rapport de la Cour des comptes du 13 septembre 2024 estime à entre 3 et 5 milliards d’euros le coût annuel de la généralisation du SNU.

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Ressources :

Tract :

Des podcasts :

  • sur l’actualité des luttes de Fréquences Paris Plurielles, le 9 octobre, le SNU 5 ans après ;
  • Une émission des ami.es d’Orwell reprenait l’enregistrement d’une réunion publique du collectif Non au SNU : https://souriez.info/Comment-l-armee-tisse-sa-toile

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Trinôme académique : extrait du document « composition des instances du trinôme académique de Grenoble »

Le Trinôme de l’académie de Grenoble :

  • ÉDUCATION : ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse – ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation
  • ARMÉE : ministère des Armées
  • IHEDN : association régionale des auditeurs de l’Institut des hautes études de Défense nationale

Représentants du Trinôme :

  • Madame Hélène INSEL, rectrice de l’académie
  • Monsieur Michel SINOIR, directeur régional, Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt de la région Auvergne-Rhône-Alpes
  • Général Hervé de COURRÊGES, commandant la 27 e Brigade d’infanterie de montagne (BIM)
  • Madame Rosène CHARPINE, présidente de l’association régionale des auditeurs Dauphiné Savoie de l’IHEDN

Les représentants du trinôme sont membres de droit de toutes les instances.

Réseaux des relais éducation-défense en bassin de formation :

Ardèche :

  • Ardèche méridionale : M. Michael VIDAUD principal du collège Le Laoul à Bourg-Saint-Andéol
  • Ardèche verte : M. Philippe TAMISIER, proviseur du lycée Gabriel Faure à Tournon-sur-Rhône
  • Drôme-Ardèche centre : Mme Christelle CAPEVAND, principale du collège Ch. de Gaulle à Guilherand-Granges

Drôme :

  • Drôme des collines : M. Pascal BROQUET, proviseur du lycée polyvalent Henri Laurens à Saint-Vallier
  • Sud-Drôme : M. Toufik BENADDA, proviseur adjoint du lycée Roumanille à Nyons
  • Vallée de la Drôme : M. Thierry DELAVET, principal du collège Revesz-Long à Crest

Isère :

  • Bassin grenoblois : M. Nicolas GARRIGUES, principal du collège André Malraux, Voreppe
  • Centre Isère : M. Alain DUFOUR, principal du collège Le Savouret à Saint-Marcellin
  • Isère rhodanienne : Mme Christine CAETANO, principale du collège de l’Isle à Vienne
  • Nord-Isère : M. Jacques BOURSIER, principal du collège René Cassin à Villefontaine

Savoie :

  • Albertville : en attente de désignation
  • Chambéry : M. Philippe BEYLIER, proviseur du lycée Louis Armand à Chambéry
  • Maurienne : M. Olivier MIQUET, principal du collège Maurienne à St Jean de Maurienne

Haute-Savoie :

  • Albanais – Annecien : en attente de désignation
  • Chablais : M. Mikaël CARRERE, principal du collège Pays de Gavot à Saint Paul en Chablais
  • Genevois – Haut-savoyard : M. Bernard LAMBERT, principal du collège Arthur Rimbaud à St-Julien-en-Genevois
  • Pays du Mont-Blanc : Mme Hélène GRINGOZ, principale du collège du Verney à Sallanches.

[3« Faire de l’aventure votre routine quotidienne », nouveau slogan des pubs de recrutement de l’armée.

[4Voir l’article L’école et l’armée, du protocole Hernu/Savary au SNU sur le site emancipation.fr.

[5Pour un aperçu de nombreux autres exemples, vous consulterez la page « Mettre en place des actions éducatives à la défense » du site eduscol.education.fr.

[6Aux enseignant.es qui auraient encore un peu foi dans leur métier, ne pas consulter ce dossier qui montre « le caractère primordial de l’engagement de la jeunesse dans la société »

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