Halte au massacre du peuple palestinien : arrêt du génocide !

« I would prefer not to… »

Mercredi 11 septembre 2024 — Dernier ajout dimanche 15 septembre 2024

« Je préférerais ne pas… »

Voilà ce que nous enseigne le scribe Bartleby dans la nouvelle d’Herman Melville. Voilà l’esprit que nous aimerions insuffler à notre tour. Cette réplique imparable et déstabilisante réduit à l’impuissance l’employeur pantois. Aucune opposition en effet mais une perpétuelle hésitation qui vous rendra aussi indiscernable qu’insaisissable. Mystère d’une parole qui dit en même temps presque oui et presque non. Donc presque travail. Travail choisi en tout cas. Car les liens de subordination qui caractérisent la relation avec l’employeur sont défaits. Désarmant et déconcertant pour le hiérarque qui se rend peu à peu compte qu’il a perdu toute autorité sur son joujou habituel. Objectif : Nous réapproprier notre outil de travail, réaffirmer notre propre autonomie contre les exigences fluctuantes et souvent absurdes de la hiérarchie. Libérééés-délivréééés !

C’est une habitude à prendre, nous en sommes convaincus. Un contre-modèle qui force à ralentir. Parce qu’ils veulent nous faire bosser plus longtemps [1](pour l’instant) et parce que nos conditions de travail se dégradent d’année en année, créant chez nombre de personnels, démotivation et envie de démissionner (ça s’accélère dangereusement ces dernières années, « Hasard ? J’crois pas naan. »).

Alors, on se résigne à ça ? Certainement pas. Cette attitude, ces actions quotidiennes, souterraines, discrètes le plus souvent (l’ostentation ici est inutile), individuelles mais créant au final une belle lutte collective, toutes ces pratiques seront autant d’obstacles à l’emprise du pouvoir actuel. Adapter son travail à son salaire. « À mauvaise paye, mauvais travail » comme il est d’usage de le résumer.

Ce n’est pas parce que ce n’est pas tous les jours la révolution que celle-ci n’est pas une affaire à l’ordre du jour, de chaque jour. Quand l’idiotie institutionnelle n’a plus de limite, quand la répression des mouvements de lutte se fait impitoyable, quand les richesses s’accumulent dans les paradis fiscaux nous laissant crever la gueule ouverte, la résistance populaire doit redoubler d’inventivité pour ne pas se laisser ronger le cerveau.

Le sabotage est aussi vieux que l’exploitation humaine. Notez bien que c’est pas nous qu’avons commencé : le sabotage des travailleuses et travailleurs est la réponse naturelle au sabotage patronal que représentent la mauvaise paye, le mépris continuel que nous subissons et la dégradation de nos conditions de travail. Qu’on se le dise : le sabotage est une invention patronale !

Pour nous, il peut prendre plusieurs formes, notre imagination n’a pas de limite. Dénoncer des pratiques honteuses de l’administration c’est saboter. Respecter parfois strictement certaines règles, c’est du sabotage (« y’a marqué ça chef, ça va prendre plus de temps mais on va faire comme c’est écrit sur la circulaire chef »), ne pas répondre à certains mails, oublier la pièce jointe de ce truc qu’on devait renvoyer absolument pour telle date (mais « oups ! »), ne plus participer à de lénifiantes réunions où l’on planifie les prochaines réunions, etc.

Bref, ne vous foulez pas, respirez, méditez en pleine conscience que vous êtes des traîne-savates et que ça fait du bien, réalisez que vous êtes en train petit à petit, de neutraliser les agressions que vous subissiez quotidiennement dans votre boulot. Vous vous mettez en panne joyeusement mais redonnez de la valeur à votre travail. Vous pouvez enfin prendre le temps nécessaire avec les élèves, vous laissez de la place pour des échanges fructueux avec vos collègues. On continue le travail mais on le ralentit. La lutte est discrète (ils nous veulent dociles, soyons subtils), ciblée et quotidienne. Elle est contagieuse car vos collègues, au bout du rouleau, vous envieront.

Sortir de notre zone d’inconfort : va falloir y arriver sinon on va jamais y arriver.

I would prefer not to - tract LDC éduc Gre (11.09.24)

[1« Oui la retraite on l’aura. Quand nous serons hors d’usage. Alors, nous aurons le temps de vivre. Avoir le temps de vivre ; mais nous serons près de la mort. » (Henriette Valet- « Les téléphonistes », Prolétariat-Les PTT par les postiers, 1933)

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